Je me souviens de ses très longs temps de dessins, d'observation devant ces rues en train de changer, avant les années 1980.
Avait-il conscience que l'esprit de la ville d' Henri Brulard était en train de disparaitre. Ainsi que cette ville des vieux, des militaires, des pauvres, des Italiens, des Algériens, de toux ceux qui ont habité ces quartiers, ces immeubles dont personne ne voulaient plus, ceux dont les enfants ensuite sont allés vivre à l'extérieur de la ville, à Meylan, Seyssins, Montbonnot , enfin dans des "villas" payées des années de travail des parents ouvriers, commerçants ou femme de ménage .
Ses tentatives de vendre ses cartes postales aux enfants des mêmes, qui pensaient qu'un type comme lui ne pouvait, assurément, ni dessiner, ni même savoir lire ou écrire, se sont confrontées à des rebuffades, à des rires, à de quolibets racistes. De footballeurs ou des supporters.
Des rues sans habitants comme dans les premières photographies dans lesquelles tout ce qui bouge n'impressionne pas la plaque. Une ville fantôme, mais parfois un habitant ou un animal, cherchez bien et vous le verrez.
La mémoire d'une Université en ville s'efface : les noms mythologiques des bars, les nombreuses librairies, les bouquinistes, les prostituées... des quartiers habités par des étudiants impécunieux, logés par d'avides logeurs italiens, marchands de sommeil à leur tour.
Et les magasins immarcescibles qui ferment, la retraite, ou s'expatrient vers des locaux modernes et accessibles aux livreurs !
La SED de spectaculaires photos en vitrine ? Le marchand réparateur de parapluie ? Le Petit Paris ? Chez Louise ?le restaurateur de poupées ? Le Troubadour !
Les fourreurs ? Ah ! qui dira l'hécatombe des fourreurs ..
Et le petit père Rivière-Sestier , son épouse ( elle boit....chuchotait les commères à la messe, évidemment s'habiller et violet et lilas, c'est pas normal).
Auphécle le F.N pour la peine de mort, la marchande de miroirs et de cadres, un coiffeur qui joue du banjo, ou de la mandoline...et Madame Zontat !
Et les arrière-cours qui pourrissent, les installations électriques dégoulinantes, les plafonds moisis, les escaliers auxquels il manquent des marches, et messieurs les rats.
En noir et blanc, et en couleurs, peu de recul dans les rues étroites, l’œil du dessin peut prendre davantage de recul que l'objectif.